En vue d’adapter les compétences disponibles de la population active aux besoins mouvants du marché, le gouvernement veut faire de la reconversion professionnelle l’un des axes de sa stratégie pour la relance de l’emploi.
Dans un contexte économique particulièrement compliqué pour l’exécutif, qui doit rapidement parvenir à un accord avec le Fonds monétaire international pour donner une bouffée d’oxygène aux finances de l’Etat, la Tunisie doit faire face à une urgence, celle du chômage. Devenu structurel depuis déjà plus d’une décennie, le taux de chômage a explosé et frôle les 19%. Le gouvernement actuel affiche ainsi sa volonté de réduire ce taux de chômage dans un contexte peu favorable à la relance économique. Intervenant à la Radio nationale, Nasreddine Nsibi, ministre de l’Emploi et porte-parole du gouvernement, a annoncé une série d’actions avec pour objectif de redonner des couleurs à l’économie nationale en berne et de l’espoir à une jeunesse frappée par un chômage endémique.
Représentant une part importante du tissu économique, le gouvernement mise sur le développement des TPE, PME. Des entreprises qui ont beaucoup souffert des conséquences de la crise sanitaire des deux dernières années. L’idée est de faciliter l’accès au financement à ces entreprises, pour qui le financement bancaire est parfois compliqué voire impossible. Endettés et incapables de garantir la pérennité de leurs PME, certains opérateurs du secteur touristique s’attendent à ce que le gouvernement mette en place le plan d’action de relance du secteur, qui prévoit notamment un rééchelonnement des dettes.
Par ailleurs, malgré une conjoncture difficile, l’exécutif espère drainer des investissements directs étrangers. Le porte-parole du gouvernement s’était ainsi félicité d’avoir réussi à convaincre une entreprise spécialisée dans la fabrication des pièces de rechange automobiles – basée en Ukraine, en grande partie grâce à l’engagement de l’un de ses employés tunisiens. Selon Nasreddine Nsibi, il y aurait 4. 000 postes à pourvoir sur les sites de l’entreprise dans les régions de Nabeul et du Kef.
En vue d’adapter les compétences disponibles de la population active aux besoins mouvants du marché, le gouvernement veut faire de la reconversion professionnelle l’un des axes de sa stratégie pour la relance de l’emploi.
« Ceux qui souhaitent intégrer le secteur privé et dont les qualifications ne correspondent pas à la demande du marché peuvent bénéficier de plusieurs formations gratuites de deux à trois mois dans les domaines du gaming et du marketing digital, entre autres », a-t-il déclaré.
Selon lui, l’inadéquation entre les besoins du marché et les compétences disponibles actuellement, fait que dans le secteur privé près de 80 000 postes disponibles ne trouvent pas preneurs. Avec le soutien financier des Nations unies et de la Banque mondiale, le gouvernement espère également encourager les jeunes à créer leurs projets. À titre d’exemple, une ligne de financement d’un montant de 20 millions de dollars a été mise en place par la Banque mondiale pour appuyer les jeunes dans les régions. Grâce à ce programme, les jeunes de ces régions peuvent aspirer à des petits financements qui peuvent aller jusqu’à 15 000 dinars.
Pour les jeunes en quête d’un meilleur avenir, ces annonces trouvent-elles un écho favorable ? Rien n’est moins certain.
« Dans une situation économique marquée par les urgences et l’instabilité politique, j’ai du mal à croire que ces programmes dédiés aux jeunes chômeurs puissent voir le jour », affirme Fathi, 36 ans, au chômage, tout en expliquant qu’il continue à garder espoir.
Un espoir qui semble plus prononcé chez Rakia 31 ans, diplômée d’une école de commerce depuis 6 ans, et toujours à la recherche d’un emploi.
« Ces mesures, si elles sont appliquées, représentent une bouée de sauvetage pour les jeunes sans emploi, j’espère que la concrétisation de ces programmes fera au plus vite, nous avons marre des réformes au goût d’inachevé », nous confie-t-elle.
Un espoir que nourrit Wahid, un autre jeune, patron d’une TPE, qui exprime son désarroi face à la crise. « Nous étouffons réellement et nous espérons vraiment que l’accès au financement sera réel et facile ».
Pour les jeunes que nous avons pu interroger, ce ne sont pas les mesures qui manquent, mais, avant tout, la volonté politique qui permet de les traduire sur le terrain. Des promesses, ils en ont vu défiler depuis 10 ans.